S'inscrire dans un parti, voter pour un parti, c'est très bien. Mais mon petit livre incite ses lecteurs à aller au-delà, à devenir des citoyens dynamiques, à investir leur énergie dans l'environnement, la lutte contre l'injustice, la défense des immigrés… Toutes choses dont les partis devraient certes s'occuper, mais le font-ils assez ? S'ils ne le font pas, il faut les y pousser !
Je ne sous-estime pas le rôle des partis politiques. Un Etat démocratique ne peut pas fonctionner sans eux. J'ai même une affection personnelle pour deux d'entre eux :
· le Parti socialiste d'une part (et je défends de tout mon cœur Martine Aubry, qui fait un remarquable travail) ;
· Europe Ecologie d'autre part, sur une liste duquel je me suis laissé inscrire, aux dernières élections régionales.
Je souhaite qu'aux législatives qui vont suivre l'élection présidentielle de 2012, plusieurs partis de gauche travaillent ensemble : communistes, verts, socialistes, et même des candidats du centre républicain. Mais attention : il ne faut pas qu'ils présentent quatre candidats différents à l'élection présidentielle. Je ne vois que deux candidats possibles en l'état actuel : Martine Aubry et Dominique Strauss-Kahn.
DSK a pris le FMI à un moment où il fallait le dénoncer, mais il est en train de le transformer assez utilement. On ne sait pas encore bien tout ce que DSK a fait. Par exemple, le FMI ne fait plus d'ajustements structurels, c'est un progrès.
Personnellement, je préfèrerais Martine Aubry : je la considère comme plus énergiquement de gauche ; mais je sais, pour le connaître, que Strauss-Kahn est aussi un homme de gauche. S'il devient Président, il réformera l'économie française selon les même lignes que celles qu'il a soutenues du temps de Jospin ou de Rocard.
Il y a eu en France une gauche qui a fait des choses, je pense au RMI, à la couverture médicale universelle… Et elle peut en faire demain davantage.
Je n'ai jamais été sensible à l'extrême gauche. Quand je défendais les sans-papiers, des gens me disaient : « Il faut les légaliser tous ! » Moi je leur répondais : « Non, il faut avoir une politique intelligente. Si on décide de régulariser tout le monde, on débouche sur des catastrophes. »
Le discours d'extrême gauche, même dans la bouche d'un homme comme Mélenchon, qui a des côtés très sympathiques, ne me paraît pas la réponse. La réponse, c'est la social-démocratie.
Ça a l'air d'être un vieux mot, mais il est très moderne. Ce n'est pas en se donnant à une idéologie qu'on fera progresser la société : on le fera par une réforme équilibrée et démocratique. Les idéologies ont fait beaucoup de mal, l'idéologie communiste comme l'idéologie néolibérale. Il faut écouter les gens, savoir ce qui les indigne, comprendre sur quoi on peut travailler avec eux, et non pas leur dire, comme le font les idéologues : voilà ce que tu dois faire.
(Entretien complet : http://www.rue89.com/entretien/2010/12/30/stephane-hessel-12-aubry-serait-ma-candidate-preferee-182841)
article publié sur Vendémiaire :